lundi 13 août 2012

Les territoires du conte - 2/2

L’héritage de Shrek : Once upon a time et Grimm, l’irruption du fantastique

Aussi évocateur soit-il, le titre ci-dessus n’en est pas moins légèrement mensonger. En effet, cet attrait pour l’univers des contes a donné lieu à deux lignées d’œuvres relativement distinctes :

La première, issue de Shrek, film réalisé par Andrew Adamson et Vicky Jenson qui ont adapté librement le conte de William Steig, s’inscrit dans une veine enfantine et plus ou moins parodique, nous donnant à voir le pays très très lointain dans lequel se déroulent les contes.
Parmi les œuvres s’inscrivant dans cette lignée, on peut citer la série de romans Princesses mais pas trop de Jim C. Hines, mettant en scène les enquêtes de Cendrillon, Belle et Blanche Neige devenues agent spéciaux du royaume ou La Revanche du Petit Chaperon rouge qui voit le personnage partir au secours d’Hansel et Gretel.

La seconde serait plutôt issue du film de Terry Gilliam, Les Frères Grimm sorti en 2005. L’approche est assez différente puisqu’il ne s’agit plus ici d’imaginer  l’univers des contes comme un univers à part entière, semblable à d’autres mondes de fantasy, mais plutôt comme une frontière franchie par les auteurs et mettant en contact nos deux mondes.

Les contes de fées sont alors utilisés sous l’angle du fantastique à proprement parler (l’irruption du surnaturel dans le monde réel), plutôt que de la fantasy.

Ainsi dans le roman Enchantement d’Orson Scott Card, le héros est un jeune universitaire américain d’origine russe, fin connaisseur de la mythologie slave qui va ainsi se retrouver confronté à la Belle au bois dormant et à la méchante sorcière Baba Yaga dont il va pénétrer l’univers.

On retrouve cette idée dans les deux séries américaines citées dans le titre :
- dans Once Upon a Time, la fille de Blanche Neige et du Prince Charmant a été envoyée dans notre monde pour être protégée des manigances de la reine, ignorante de ces origines elle découvrira progressivement que les personnages des contes de fées vivent dans une petite ville du Maine.
- dans Grimm, le héros est un détective chargé de protéger la population des monstres de contes qui ont infiltré le monde réel.

Cette idée se retrouve également dans de nombreux romans dont certains sont évoqués dans la bibliographie, on peut citer ainsi :
- Les sœurs Grimm de Michael Buckley
- Petits contes à régler de Gaël Bordet
- Peter & Max : dans l'univers de Fables de Bill Willingham, complément de la série de comics du même auteur.
- Règlement de contes, série de BD de Damien Marie et Damien Vanderstraeten

Dans les œuvres évoquées jusqu'à présent les références aux contes sont relativement claires, mais voilà  d’autres romans qui utilisent cet imaginaire de façon moins précise :

- La guerre des fleurs de Tad Williams est un récit de low fantasy (roman mettant en scène la découverte d’un monde imaginaire, Le monde de Narnia de C. S. Lewis étant l’un des meilleurs exemples du genre) , relativement classique à première vue mais dont le monde se base sur l’univers des fées (l’un des personnages est un hommage non dissimulé à la Fée Clochette de J. M. Barrie).

- Les flammes de la nuit de      Michel Pagel : un enchanteur détourne les vœux jetés par les fées sur le berceau de la princesse Rowena et fait d’elle une sorcière indépendante et fière.

- Les chroniques de l'Imaginarium Geographica de James A. Owen : on retrouve, dans un autre contexte toutefois, l’idée que certaines histoires ne sortent pas de l’imagination des auteurs mais qu’elles ont été réellement vécues par eux (comme dans le film de Terry Gilliam).



Dans cet article nous avons évoqué les contes de fée uniquement sous l’angle du merveilleux et de la fantasy, il s’agit toutefois pour la plupart de récits dont la structure et la morale sont relativement intemporelles, cela fait que de nombreuses œuvres, cinématographiques notamment, vont faire allusion à ces textes qui font partie de la mémoire de l’humanité, Le Petit Chaperon rouge en particulier a donné lieu à de nombreuses adaptations qui, pour certaines, ne retiennent que la trame générale de l’œuvre et s’éloignent du merveilleux, on peut ainsi citer :

De la même façon que les contes merveilleux témoignaient de la volonté de ré-insuffler de l’irrationnel dans un monde modelé par la philosophie des Lumières, sans doute ces nombreuses adaptations sont un moyen de réinjecter du rêve dans un monde qui en manque parfois cruellement.

Damien Moutaux (Médiathèque la Corderie - Marcq-en-Baroeul)

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