vendredi 5 octobre 2012

L'Ellipse de Gilles Warembourg

« Dans la cité fortifiée d'Eksamorrhe, rien n'est laissé au hasard : le jour, la nuit, les repas, l'amour... La vie eksante est rythmée par les appels incessants de l'Ellipse, sous l’œil vigilant du Gardien cloîtré dans la Tour. Au mépris des commandements de l'hexalogue, Teliau et Ande entretiennent une relation interdite. De transgression en transgression, les deux étudiants découvrent les facettes cachées de leur monde... »

Un résumé engageant pour un roman qui se révèle au final assez intrigant. Sixième roman de GillesWarembourg, écrivain nordiste arrivé à la littérature après 27 ans passés dans la gestion des entreprises, l’Ellipse (Editions Atria) marque également son retour à la science-fiction après l’Oeil du calamar qui lui a valu le Prix d'honneur de l'Académie littéraire de Provence 2009.
Précédemment, cet écrivain touche-à-tout s’était illustré dans le polar et le récit de chroniques populaires.
On retrouve l’influence de ces genres dans l’Ellipse à travers un relatif refus de sacrifier au spectaculaire généralement associé au genre.
Même si le roman emprunte à la fois à la science-fiction et au roman dystopique*, la description d’une société hyper dirigiste se fait vraiment à hauteur d‘homme et le contexte global des événements auquel le récit se rattache n’est au final que très peu évoqué, ceci étant à la fois la force et la limite de ce roman.
En faisant de l’amour la force qui pousse le héros à commencer à transgresser les règles de la société, l’auteur le rend immédiatement accessible pour le lecteur, et lorsque ces transgressions s’inscriront dans une quête de la vérité sur la nature réelle d'Eksamorrhe, la dimension profondément humaine du récit perdurera.
Genre ultra référencé s'il en est, la science-fiction se prête naturellement au jeu des comparaisons et autres références et ce roman ne fait pas exception.
Si le résumé nous présente une société en apparence liberticide, la dimension dystopique s'efface progressivement au cours de la lecture. Ce roman n'a pas vocation à dépeindre un futur crédible pour nous mettre en garde contre certaines dérives de la société,  le lecteur a plutôt au contraire le sentiment de regarder évoluer une société qui serait une sorte d'expérience  en voie de désagrégation.
Le rapport entre le héros et son professeur fait d'ailleurs penser au roman La vague de Todd Strasser, la plupart des personnages du roman étant persuadés du bien fondé du respect des règles de cette société.
Avec ce récit relativement court, Gilles Warembourg fait l'éloge de la libre pensée s'opposant à toutes les formes d'uniformisation de la société, toutefois - et il le reconnait lui-même dans sa postface - le lecteur a un peu le sentiment, à la fin du récit, de ne pas avoir fait le tour d'un univers potentiellement riche.
Ainsi, sur une trame partiellement similaire, Pierre Bordage nous offrait avec son cycle d'Abzalon un récit certes moins intimiste, mais plus ample et au final moins frustrant.
Ce roman se révèle donc attachant, nécessaire sans doute dans cette période où la pensée unique tend à se développer, toutefois on peut espérer que l'auteur aura l'occasion ultérieurement de  nous conter la suite des événements qui affectent la cité d'Eksamorrhe.


*dystopie = le contraire de l'utopie

Damien Moutaux (Médiathèque La Corderie - Marcq-en-Baroeul)


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